" La Clé du Compost " :l'humour au service de la pédagogie. Une habitude bien ancrée (elle remonte au moins au début du Lycée )a eu longtemps cours parmi techniciens et surveillants. Cette pratique est née probablement de l'imagination d'un enseignant excédé mais plein d'humour ;c'était un bon moyen de " calmer " un élève agité,bavard, bruyant. Une connivence (magique à mes yeux) régnait entre les enseignants, si bien que lorsqu'un élève se présentait de la part de M.Laporte dans le bureau de M.Bardon, en quête de " la clé du compost " c'est d'un air imperturbable que ce dernier le dirigeait vers M.Moulin,qui l'adressait à M.Mouttet et ainsi de suite. A chaque étape l'agacement de l'élève grandissait et la séance se passait pour lui en promenades aussi lassantes qu'inutiles car, comme bien vous supposez , à chaque tentative il devait cheminer d'un bout à l'autre de l'établissement, parcourir tout le territoire et en tous sens. Bien entendu à chaque étape il trainait davantage les pieds,trouvant un peu plus absurde et un peu plus fastidieux de remplir cette tâche qui semblait si sérieuse et si nécessaire aux enseignants d'autant que le demandeur initial prenait grand soin de ne pas préciser " pourquoi " il avait tellement besoin de l'objet égaré. Pour le malheureux, engagé dans sa quête du Grâal il s'avérait inutile de revenir au point de départ ; dans ce cas, une nouvelle destination lui était proposée et le revoila parti, tête basse,pestant et maugréant,sous les rires de ses camarades que sa triste figure réjouissait.Re traversant les cours et les parcelles il s'efforçait de trouver M.X qui détenait probablement l'information sur cet objet détestable.Se sentant abandonné par les siens,il se résignait à ces démarches sentant bien qu'il évitait de cette manière un après-midi de colle et trainant des pieds de plus en plus lourds il s'appliquait dans sa recherche,un échec pouvant lui attirer de sévères réprimandes. Aucun local ne contenait de réserve de compost -le tas de compost était en plein air- et aucune clé n'existait. Bien que cette pratique ait été limitée à quelques enseignants, il était facile d'en connaître l'existence.Lorsque M.Moulin rencontrait M.Laporte ou si ce dernier croisait M.Bardon , la même scène se reproduisait : "Je vous ai envoyé Untel " " Ah oui, je l'ai envoyé voir M.Machin ",.cela les amusait mais ils vérifiaient cependant que le stratagème avait bien fonctionné .Et je les voyais rire de bon cœur. L'élève revenait vers son professeur en fin de séance,la mine longue,mais bien décidé à ne pas renouveler une expérience aussi infructueuse et qui l'avait ridiculisé auprès de ses camarades.Pendant les cours suivants il se tenait tranquille et c'était autant de gagné pour le professeur. Par la suite,et selon toute appparence,il se contentait de ronger son frein sans rien révéler même s'il avait fini par comprendre l'énigme. A ma connaissance les élèves n'ont jamais vraiment découvert la supercherie ;en tous cas,il me semble bien qu'ils ne vendaient pas la mèche lorsqu'ils avaient compris, heureux qu'on leur ait offert un moyen d'échapper à cette punition terrible pour un interne : être privé de sortie. A.Roux
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